Il est un devoir de faire l’exégèse de cette ‘ayah dans un autre sens que celui de l’établissement, de la position assise ou de ce qui est de cet ordre, devient mécréant qui croit en de telles choses. Il est donc un devoir de s’abstenir de retenir le sens apparent –qui vient communément à l’esprit– et l’on retient au contraire une sémantique compatible avec la raison. Par conséquent, on retient pour le terme (istawa) le sens de (al-qahr) –la domination–. En effet dans la langue des arabes, on dit qu’Untel a dominé les royaumes :
(إِسْتَوَى فُلاَنٌ عَلَى الْمَمَالِكِ)
(istawa foulanoun ^ala l-mamalik) lorsqu’il a pris les rênes du pouvoir et a fait peser son joug sur les gens, comme le dit le poète :
(قَدِ اسْتَوَى بِشْرٌ عَلَى الْعِرَاقِ مِنْ غَيْرِ سَيْفٍ وَدَمٍ مُهْرَاقٍ)
Qadi stawa Bichroun ^ala l-^Iraqi min ghayri sayfin wa damin mouhraqi
ce qui signifie :
« Bichr a dominé l’Irak assurément
sans tirer d’épée ni faire couler de sang ».[1]
L’intérêt de spécifier le Trône en le citant dans la ‘ayah, c’est parce qu’il est la plus grande des créatures de Allah ta^ala ; ainsi, on apprend que cela concerne ce qui est plus petit que le Trône à plus forte raison. L’Imam ^Aliyy a dit : (‘inna l-Laha khalaqa l-^archa ‘idh-haran liqoudratihi wa lam yattakhidh-hou makanan lidhatih) ce qui signifie : « Allah ta^ala a créé le Trône par manifestation de Sa toute-puissance et ne l’a pas pris comme endroit pour Lui-même ». Ceci a été rapporté par l’Imam, le mouhaddith, faqih et linguiste, Abou Mansour At-Tamimiyy dans son livre At-Tabsirah.
Il est possible par ailleurs de dire qu’Il a un (istiwa‘) que Lui sait tout en L’exemptant de l’istiwa‘ des créatures tel que la position assise et l’établissement.
Sachez aussi qu’il est un devoir de mettre en garde contre ces gens qui considèrent possible le fait de s’asseoir et de s’établir sur le Trône concernant Allah, eux qui expliquent Sa parole ta^ala :
[الرَّحْمَنُ عَلَى الْعَرْشِ اسْتَوَى] [2]
(Ar-Rahmanou ^ala l-^archi stawa) par la position assise ou par le face à face par au-dessus, eux qui prétendent (qu’on ne peut concevoir l’existence d’un être que dans un endroit), leur argumentation est invalide. Eux qui prétendent aussi que la parole des gens du Salaf : « istawa sans comment » serait en accord avec leur croyance, ils n’ont pas su que le comment que les gens du Salaf ont nié, c’est justement la position assise, l’établissement, la localisation dans un endroit, le face à face avec un corps ainsi que toutes les aspects physiques ou moraux tels que mouvement, immobilité et humeur [3].
Al-Qouchayriyy a dit :
« Et ce qui réfute leur équivoque, c’est de leur dire : existe-t-Il avant de créer le monde ou l’endroit ou non ? De par l’évidence rationnelle, ils devraient dire : “oui”. Par conséquent, si leur parole (qu’on ne conçoit un être que s’il est dans un endroit) était valable, ceci les mènerait à l’une de deux choses : soit à dire (que l’endroit, le Trône et le monde sont exempts de début) –c’est-à-dire qu’il n’y a pas de début à leur existence–, soit à dire : (le Seigneur est entré en existence), voilà à quoi aboutissent les ignorants hachawiyy [4] ; Celui Qui est exempt de début n’est pas créé et ce qui est créé n’est pas éternel » Fin de citation.
Al-Qouchayriyy a dit aussi dans At-Tadhkiratou ch-Charqiyyah :
« D’autre part, s’ils disent (que n’est-ce pas que Allah dit :
[الرَّحْمَنُ عَلَى الْعَرْشِ اسْتَوَى] [5]
(Ar-Rahmanou ^ala l-^archi stawa), qu’il faut donc le prendre selon son sens apparent) alors nous disons : Allah dit aussi :
[وَهُوَ مَعَكُمْ أَيْنَمَا كُنْتُمْ] [6]
(wahouwa ma^akoum ‘aynama kountoum) et Il dit :
[أَلاَ إِنَّهُ بِكُلِّ شَيْءٍ مُحِيط] [7]
(‘ala ‘innahou bikoulli chay’in mouhit), il conviendrait donc aussi selon vous de prendre le sens apparent de ces ‘ayah, de sorte qu’Il serait d’après vous au-dessus du Trône, près de nous, avec nous, englobant le monde, l’entourant de tout les côtés par Lui-même, tout cela en même temps !! ».
Al-Qouchayriyy, que Allah l’agrée, a dit : « Et il est impossible qu’un être unique –qui ne se divise pas– soit par son être en même temps à tout endroit –partout– ».
Al-Qouchayriyy, que Allah l’agrée, a dit : « Ils disent eux-mêmes (que Sa parole :
[وَهُوَ مَعَكُمْ]
(wahouwa ma^akoum) signifie “par Sa science” et que
[بِكُلِّ شَيْءٍ مُحِيط]
(bikoulli chay’in mouhit) c’est l’englobement de la science), nous nous disons : et Sa parole :
[عَلَى الْعَرْشِ اسْتَوَى]
(^ala l-^archi stawa) signifie : (qahara) –Il domine–, (hafidha) –Il préserve– et (‘abqa) –Il maintient en existence– » Fin de citation.
Cela signifie qu’ils interprètent ces ‘ayah sans retenir leurs sens apparents. Alors, comment se fait-il qu’ils reprochent aux autres d’interpréter la ‘ayah de l’istiwa‘ par la domination (al-qahr) ?! Qu’est-ce que c’est que ce parti pris arbitraire ?!
Al-Qouchayriyy, que Allah l’agrée, a dit : « Si ce que nous disons laissait penser qu’Il aurait été vaincu –avant d’avoir dominé d’après eux– alors Sa parole :
[وَهُوَ الْقَاهِرُ فَوْقَ عِبَادِهِ] [8]
(wahouwa l-Qahirou fawqa ^ibadih) [9] elle aussi suggérerait cela au point que quelqu’un irait dire (qu’Il aurait été dominé avant la création des esclaves), loin s’en faut, puisque les esclaves n’avaient pas d’existence avant qu’Il ne les crées ! Plus encore, s’il en était comme les ignorants se l‘imaginent (qu’il s’agirait d’un istiwa‘ qui adviendrait à Son Être), cela suggérerait le changement et un ploiement précédant l’instant de l’istiwa‘ ! D’autre part Celui Qui crée (Al-Bari’) ta^ala existe de toute éternité, avant le Trône et celui qui est équitable et objectif aura su que la parole de celui qui dit (al-^archou bir-Rabbi s-tawa) est meilleure que la parole de celui qui dit (ar-Rabbou bil-^archi stawa). Ainsi, le Seigneur a pour attributs la gloire (al-^oulouww), la supériorité du mérite (fawqiyyatou r-routbah) et l’éminence (al-^adhamah) et Il est exempt d’être dans un endroit et d’être en face d’un corps » Fin de citation.
Al-Qouchayriyy, que Allah l’agrée, a dit : « Il est apparu un groupe de gens, s’ils n’entraînaient pas la population dans l’égarement avec ce qui se rapproche de leur façon de réfléchir et ce qui se conçoit facilement dans leur imagination, j’aurais évité d’entacher ce livre en les citant. Ils disent : (Nous nous prenons le sens apparent et nous retenons le sens apparent pour les ‘ayah dont les sens apparents suggèrent l’assimilation et pour les nouvelles rapportées qui suggèrent limite et membre, et il n’est pas permis de faire appel à l’interprétation pour quoi que ce soit de tout cela). Et ils s’attachent, selon leur prétention, à la parole de Allah ta^ala :
[وَمَا يَعْلَمُ تَأْوِيلَهُ إِلاَّ اللهُ] [10]
(wa ma ya^lamou ta’wilahou ‘il-la l-Lah) qui signifie : « Et ne sait son terme fixé que Allah ». Ces gens-là, par Celui Qui détient nos âmes par Sa toute-puissance, sont plus nuisibles à l’Islam que les mécréants déclarés. En effet, les égarements des mécréants déclarés sont clairs et les musulmans s’en écartent spontanément, alors que ceux-là ont attaqué la religion et les gens du commun d’une manière par à laquelle les plus faibles se laissent duper. Ils ont suggéré ces innovations à leurs adeptes et ont fait pénétré dans leurs cœurs la croyance que Celui Qui est adoré soubhanah a pour attribut les membres, les organes, la montée, la descente, l’appui, la position couchée, la position assise ainsi que le déplacement dans les directions » Fin de citation.
Al-Qouchayriyy, que Allah l’agrée, a dit : « Celui donc qui penche pour leurs sens apparents se mettra avec sa propre imagination à s’imaginer des choses perceptibles aux sens et aura cru dès lors des choses scandaleuses et le courant l’emportera sans même qu’il s’en rende compte » Fin de citation.
Il est donc clairement apparu que la parole de celui qui dit (que l’interprétation n’est pas permise) est une grossièreté et une ignorance. Ceci est prouvé par sa parole r en faveur de Ibnou ^Abbas :
(( اللَّهُمَّ عَلِّمْهُ الحِكْمَةَ وَتَأْوِيلَ الْكِتَابِ ))
(Allahoumma ^allimhou l-hikmata wa ta’wila l-kitab) qui signifie : « Ô Allah, apprends-lui la sagesse et l’interprétation du Livre ». Cette parole est rapportée par Al-Boukhariyy, Ibnou Majah et d’autres encore en des termes différents.
Le Hafidh Ibnou l-Jawziyy dans son livre Al-Majalis a dit : « Il n’y a pas de doute que Allah a exaucé cette invocation du Messager ». Puis, il a fortement blâmé et dénoncé ceux qui interdisent l’interprétation et a beaucoup détaillé à ce sujet. Que celui qui veut s’en assurer davantage le lise.
La signification de Sa parole ta^ala :
[يَخَافُونَ رَبَّهُمْ مِنْ فَوْقِهِمْ] [11]
(yakhafouna rabbahoum min fawqihim) c’est la supériorité par la domination (fawqiyyatou l-qahr) et non la supériorité (al-fawqiyyah) spaciale et directionnelle –c’est-à-dire être au-dessus physiquement. Quant à la signification de Sa parole ta^ala :
[وَجَاءَ رَبُّكَ وَالْمَلَكُ صَفّاً صَفّاً] [12]
(wa ja‘a rabbouka wa l-malakou saffan saffa) il ne s’agit pas dans cette ‘ayah d’une venue (maji‘) par le mouvement, le déplacement, le départ d’un lieu, la libération d’un endroit pour en occuper un autre concernant Allah, celui qui croit cela devient mécréant.
En effet, Allah ta^ala crée le mouvement et l’immobilité et tout ce qui fait partie des attributs des créatures. Ainsi, on ne qualifie Allah ta^ala ni par le mouvement ni par l’immobilité. Bien plus, le sens qui est visé par Sa parole :
[وَجَاءَ رَبُّكَ]
(wa ja‘a rabbouk) c’est (ja‘a ‘amrou rabbik) c’est-à-dire : « est venue la manifestation de la toute-puissance de ton Seigneur ». Il a été confirmé à propos de Sa parole ta^ala :
[وَجَاءَ رَبُّكَ]
(wa ja‘a rabbouka) que l’Imam ‘Ahmad a dit (ja‘at qoudratouh) [13] ce qui signifie : « Sont venues [des manifestations] de la toute-puissance » c’est-à-dire les faits importants que Allah a créés pour le Jour du Jugement. Rapporté par Al-Bayhaqiyy dans Manaqibou ‘Ahmad qui a déjà été mentionné plus haut.
[1] Si le terme (istawa) n’avait que le sens de s’asseoir ou de s’installer et n’avait pas le sens de dominer, le sens de ce vers très célèbre qui fait l’éloge de Bichr serait nul et non avenu.
[2] [souratou Taha / 5]
[3] humeur et changement d’humeur également
[4] hachawiyy c’est-à-dire mouchabbih moujassim : qui croit que Allah est un corps sans l’avouer explicitement.
[5] [souratou Taha / 5]
[6] [souratou l-Hadid / 4]
[7] [souratou Foussilat / 54]
[8] [souratou l-‘An^am / 61]
[9] Ce qui signifie : « Et Il est Celui Qui domine Ses esclaves par Sa toute-puissance »
[10] [souratou ‘Ali ^Imran / 7] selon la lecture dans laquelle on s’arrête après le nom « Allah ».
[11] [souratou n-Nahl / 50] Elle signifie : « Ils craignent leur Seigneur Lui Qui a sur eux la domination absolue »
[12] [souratou l-Fajr / 22]
[13] Ainsi, par la toute-puissance de Allah, ces manifestations apparaîtront lorsque les anges seront présents en rangs pour l’éminence de ce jour-là de sorte à cerner les humains et les jinn et personne ne pourra quitter cet endroit sauf avec la permission de Allah. Celui qui aura donc la permission pourra le quitter. Ce jour-là apparaîtront de grands événements. L’enfer qui est à une très grande distance en deça de la septième terre, ce jour-là, soixante dix milles anges en traîneront une partie afin que les mécréants le voient et en soient terrifiés ; chacun de ces anges aura à la main une chaîne attachée à l’enfer et chacun d’entre eux aura une force qui surpasse celle des humains. Ils traîneront l’enfer pour que les gens le voient à partir du lieu qu’ils occuperont lors de cette étape du Jour du Jugement, ils le regarderont. Ensuite, les anges le ramèneront à sa place. Ceci n’est qu’un événement parmi beaucoup d’autres événements terribles du Jour dernier.