CHAPITRE 7
Supplices et Délices de la tombe
Avant de connaître certains supplices ou délices de la tombe, la personne inhumée devra, au préalable, passer par l’épreuve du Questionnement des Anges Mounkar et Nakiyr.
Notons que les Prophètes, les martyrs de la guerre sainte et les enfants non pubères sont exemptés de cette épreuve.
D’après une Tradition juste, le compagnon ‘Anas Ibnou Mâlik rapporte que le Prophète ﷺ a dit :
العَبْدُ إذَا وُضِعَ في قَبْرِهِ، وتُوُلِّيَ وذَهَبَ أصْحَابُهُ حتَّى إنَّه لَيَسْمَعُ قَرْعَ نِعَالِهِمْ، أتَاهُ مَلَكَانِ، فأقْعَدَاهُ، فَيَقُولَانِ له: ما كُنْتَ تَقُولُ في هذا الرَّجُلِ مُحَمَّدٍ ﷺ
Ce qui signifie :
« L’homme, à peine déposé dans sa tombe, alors que les siens viennent de le quitter, et qu’il entend le bruit de leurs pas, voit deux Anges se présenter à lui, le faire asseoir et lui poser la question suivante : – Que disais-tu de cet homme (appelé) Mouhammad ? …»
(Rapporté par Boukhâriy)
Et selon la réponse qu’il donnera, sa tombe sera pour lui un jardin du Paradis, en termes de jouissance, ou un antre de l’Enfer en termes de châtiment. En effet, dans la tombe l’âme revient au corps conformément au Hadith dans lequel ^Abdoul-Lâh Ibnou ^Oumar
dit que le Prophète ﷺ parla un jour de l’épreuve du Questionnement dans la tombe. C’est alors que ^Oumar demanda :
أترد علينا عقولنا يا رسول الله قال نعم كهيئتكم اليوم قال فبفيه الحجر
Ce qui signifie :
« Ô Prophète de Dieu ! Est-ce que la raison nous sera rendue ? “Oui, comme maintenant”, répondit-il. Sur ce ^Oumar n’ajouta plus rien. »
(Rapporté par l’imam ‘Ahmad)
Le cas des Prophètes est encore plus révélateur, car non seulement la terre ne ronge pas leur corps[1], mais ils sont vivants dans leur tombe. En effet, d’après le compagnon ‘Anas ‘Ibnou Mâlik, le Prophète ﷺ a dit :
الأنبياء أحياء في قبورهم يصلون
Ce qui signifie :
« Les Prophètes sont vivants dans leur tombe et ils prient[2]. »
(Rapporté par ‘Al-Bayhaqiy)
A la question posée, dans la langue de chacun, par les deux Anges :
– Que disais-tu de cet homme (appelé) Mouhammad ﷺ ? Les non-Croyants, dont l’hypocrite[3], tout paniqués et terrorisés laisseront échapper : – Je ne
sais pas ; je répétais ce que les gens disaient ! Sur ce, les Anges lui objecteront : – En fait, nous savons ce que tu disais. Tu n’as donc rien su de la vérité et tu ne l’as pas suivie! Et avec un marteau de fer, ils lui assèneront un violent coup derrière la tête, au-dessus de la nuque, qui lui fera pousser un hurlement qu’entendront tous ceux qui sont alentour, à l’exclusion des djinns et des humains. Une montagne s’effondrerait sous l’effet d’un tel coup, mais Allâh maintiendra le non-Croyant conscient pour qu’il endure cette terrible souffrance. Alors, la terre recevra l’ordre de le compresser jusqu’à ce que ses côtes s’entrecroisent. Il connaîtra l’angoisse de la solitude et de l’obscurité la plus totale ; des serpents, des scorpions et d’autres bêtes terrifiantes l’assailleront de toutes parts. Lorsque son corps se sera désintégré, son âme s’enfoncera dans la septième terre en un lieu de châtiments atroces appelé “Sijjiyn”. Il ne connaîtra alors aucun répit ; puis après la résurrection et le Jugement dernier, il sera précipité, corps et âme, dans l’Enfer pour y demeurer éternellement.
Quant à certains Musulmans, grands pécheurs non repentis, ils seront également soumis à une compression de la tombe et à l’entrecroisement de leurs côtes. Toutefois ces châtiments seront moins intenses que ceux que subiront les non-Croyants.
A propos du châtiment subi dans la tombe par les mécréants, nous apprenons que Dieu dit :
النَّارُ يُعْرَضُونَ عَلَيْهَا غُدُوًّا وَعَشِيًّا وَيَوْمَ تَقُومُ السَّاعَةُ أَدْخِلُوا ءالَ فِرْعَوْنَ أَشَدَّ الْعَذَابِ
Ce qui signifie :
« Matin et soir, leur âme est exposée au feu de l’Enfer qui les attend ; et le Jour Dernier, introduisez Pharaon et ses acolytes en Enfer pour qu’ils subissent le plus atroce des châtiments. »
(Qour’ân : sourate 40, Ghâfir / 46)
Dieu dit encore :
وَمَنْ أَعْرَضَ عَن ذِكْرِي فَإِنَّ لَهُ مَعِيشَةً ضَنكًا وَنَحْشُرُهُ يَوْمَ الْقِيَامَةِ أَعْمَى
Ce qui signifie :
« Quiconque s’est détourné de la Religion que J’ai agréée, connaîtra l’exiguité et la compression dans la tombe; il comparaîtra aveugle, incapable de trouver une excuse pour se disculper lors du Rassemblement du Jugement dernier. »
(Qour’ân : sourate 20, Tâhâ / 124)
Tel est le sort réservé à celui qui meurt non-Croyant, qu’il s’agisse de celui qui n’a jamais été Croyant ou de celui qui est sorti de la Religion agréée par Dieu, en devenant apostat “Mourtadd”. Les enfants nés de parents non-Croyants, morts avant la puberté, ne connaîtront ni les délices, ni les supplices de la tombe.
A la même question des Anges : – Que disais-tu de cet homme (appelé) Mouhammad ﷺ? Le Croyant pieux répondra : – Je témoigne qu’il est l’esclave de Dieu et son Prophète. Et les deux Anges de lui dire : – Certes, nous savions que tu disais cela.
Alors Allâh fait s’illuminer sa tombe d’une lumière comparable à celle de la pleine lune, et s’élargir de soixante-dix coudées[4] en longueur et en largeur. Afin
d’accroître sa jouissance, les Anges lui présenteront deux emplacements en disant : – Regarde la place que tu aurais autrement occupée en Enfer, mais que Dieu par sa Clémence a remplacée par cette demeure au Paradis.
Pour nous donner une idée de cette jouissance spéciale, le Prophète ﷺ a expliqué qu’on dira à ce Croyant : « Alors dors du sommeil du nouveau marié qui n’aimerait être réveillé que par sa bien-aimée. »
Tous ces délices ne sont qu’un prélude par rapport à ce qui l’attend au Paradis où Allâh a réservé pour Ses esclaves pieux ce qu’aucun œil n’a vu, aucune oreille n’a entendu et aucun esprit n’a imaginé. Allâh dit :
فَلا تَعْلَمُ نَفْسٌ مَّا أُخْفِيَ لَهُم مِّن قُرَّةِ أَعْيُنٍ جَزَاء بِمَا كَانُوا يَعْمَلُونَ
Ce qui signifie :
« Aucune âme ne sait quelle félicité lui est réservée en récompense de ses bonnes œuvres. »
(Qour’ân : sourate 32, ‘As-Sajdah / 17)
C’est dans ce sens qu’on comprend mieux la parole suivante du Prophète ﷺ :
الدنيا سجن المؤمن وسنَتُه فإذا فارق الدنيا فارق السجنَ والسَّنة
Ce qui signifie :
« La vie est une prison et une famine pour le Croyant pieux ; en la quittant, il quitte donc la prison et la famine.»
(Rapporté par ‘Ibnou Hibbân)
Ceci bien entendu par rapport à ce qu’il connaîtra comme jouissance, aussi bien dans la tombe qu’après.
Celui qui veut jouir du délice de la tombe doit pour cela accomplir toutes les obligations (prières, jeûne,
etc.) et s’éloigner des péchés, par crainte de Dieu.
Définition
Le Croyant désobéissant est celui qui, par exemple :
Ces Croyants-là, selon le jugement de Dieu, méritent le châtiment de la tombe[5] s’ils meurent sans se repentir de leurs péchés. Mais il y aura deux groupes :
Ainsi, après avoir subi dans l’Enfer le châtiment qu’ils méritent, ils en sortiront pour entrer définitivement au
Paradis.
Une Tradition rapportée par ‘Ibnou ^Abbâs, le cousin du Prophète et d’autres spécialistes du Hadith donne la preuve que le Croyant désobéissant peut subir le châtiment de la tombe. En effet, passant près de deux tombes, le Prophète ﷺ s’adressa à ses compagnons en leur disant :
إنهما ليعذبان، وما يعذبان في كبير أما أحدهما فكان لا يستنزه من البول ، وأما الآخر فكان يمشي بالنميمة ثم أخذ جريدة رطبة فشقها نصفين فغرز في كل قبر واحدة قالوا يا رسول الله لمَ فعلت هذا قال لعله يُخفف عنهما ما لم ييْبسا
Ce qui signifie :
« Ces deux morts-là sont suppliciés dans leurs tombes et pas pour des péchés graves aux yeux des gens. Et pourtant si ! L’un d’eux ne se préservait pas de son urine[6] et l’autre semait la zizanie en colportant les paroles des uns et des autres. Il prit une branche de palmier et après l’avoir fendue en deux, planta une partie sur chaque tombe. Les compagnons demandèrent : Ô Messager de Dieu, pourquoi as-tu fait cela ? Il leur répondit : Puissent-elles (ces deux parties) demander pardon pour eux aussi longtemps qu’elles n’auront pas séché. »
(Rapporté par Boukhâriy)
Et selon un Hadith rapporté par le Traditionaliste ‘Aboû Dâwoûd, nous apprenons que la plupart des châtiments de la tombe sont dus au fait de ne pas se préserver de l’urine.
Remarque
Dans un Hadith rapporté par le Traditionaliste ‘At–Tabarâniy, le Prophète ﷺ nous a appris que la lecture quotidienne d’une sourate du Qour’ân qui n’a que trente versets préserve du châtiment de la tombe. Il s’agit de Sourate « ‘Al-Moulk » (chapitre 67 du Qour’ân).
Lorsque le corps aura été décomposé, à l’exception d’un os infime appelé ^Ajboudh-Dhanab, de la taille d’un grain de moutarde au bas du coccyx, l’âme du pieux ira au Paradis, et celle du Croyant désobéissant restera entre ciel et terre, ou pourra atteindre le premier ciel.
Quant à l’âme du mécréant, elle ira à Sijjiyn, un lieu de châtiment situé dans la septième terre[7].
S’agissant des martyrs, dont le corps ne se décompose jamais, leur âme monte directement au Paradis sans intégrer la tombe, afin de prendre place dans le gosier d’oiseaux verts. Ces oiseaux se nourrissent de délicieux fruits du Paradis, volent de branche en branche et s’abritent dans des niches accrochées sous le Trône. Dieu fait que la saveur de cette délicieuse nourriture parvienne sous forme d’une exquise délectation au corps resté lui intact dans la tombe.
[1] La terre ne ronge pas non plus le corps des Martyrs de la guerre sainte et de certains Saints, comme cela a été constaté à maintes reprises dans plusieurs endroits différents. Ainsi le corps du grand Traditionaliste Ibnou s–Salâh fut retrouvé intact huit siècles après son ensevelissement.
[2] Il ne s’agit pas d’une prière obligatoire, mais d’un délice.
[3] C’est celui qui prononce les deux témoignages alors que, en son for intérieur, il déteste l’Islâm ou doute de sa véracité.
[4] Une coudée correspond à 45 cm, environ.
[5] Le Prophète a dit, dans le sens : « Demandez la protection de Dieu contre le châtiment de la tombe. » Rapporté par Boukhâriy.
[6] Pour se préserver de l’urine, on s’assurera d’abord qu’on a bien fini d’uriner et on se nettoiera ensuite selon la méthode islamique, afin de ne tâcher ni son corps ni ses habits.
[7] De même qu’il y a sept cieux, le nombre des terres est également de sept. Elles ont une épaisseur de 500 ans et sont séparées les unes des autres par une distance de 500 ans (vitesse d’un oiseau).